L’ombre d’un secret de Virginie Saint-Martin aux éditions City Edition.
D’abord paru en auto-édition sous le titre Une vie entière à fuir : Un destin français, en 2022, il est édité par City Edition en 2023 sous le titre L’ombre d’un secret.
Plus qu’une découverte, c’est un véritable coup de cœur, un livre impossible à lâcher, truffé de personnages attachants, libres et courageux et rempli d’émotions.
Incipit :
Alphonsine, paysanne bretonne illettrée, rêve depuis son plus jeune âge de quitter son Morbihan natal pour rejoindre la capitale, la Ville Lumière. Entêtée, effrontée et n’ayant pas froid aux yeux, elle refuse de se résigner à subir son destin au sein d’une famille où le père a basculé dans l’alcoolisme et la violence au décès de sa benjamine. A dix-sept ans, Alphonsine débarque à Paris pour faire la « bonniche ». La chance lui sourit lorsqu’elle entre au service des Chemtov, un couple de Juifs polonais exilés en France. Pétris de bienveillance et d’ouverture d’esprit, ils vont bouleverser la vie d’Alphonsine et la marquer à tout jamais. Le vilain petit canard rustre et campagnard se transforme en un magnifique cygne chic et urbain. La petite fille ambitieuse au caractère bien trempé devient une femme résolument moderne, libre et indépendante. Mais si la chance lui a souri, la vie se charge de semer de nombreux obstacles et épreuves sur son chemin qui l’obligeront à porter toute sa vie un lourd secret.
Mon avis :
En un mot comme en cent, j’ai adoré. L’auteure, à travers la vie d’Alphonsine, nous décrit l’évolution de la société et des mœurs, la condition féminine des débuts 1900 à 2018. L’écriture est fluide, le rythme soutenu, le lecteur ne s’ennuie jamais, il est captivé par le destin hors norme de cette femme forte et libre. Le livre regorge de personnages attachants, de très belles personnes, bienveillantes, courageuses et droites : Julien, Ivan, Madame Morel, le couple Chemtov, Zofia, Louis….Des liens forts, parfois plus forts que ceux du sang, se tissent entre tous ces personnages, l’émotion est souvent au rendez-vous. Cette saga familiale est aussi une histoire de résilience, de pardon. A travers le regard d’Alphonsine, le lecteur vit la transformation au fil du temps de Paris et l’évolution de la société et des mœurs. En féministe convaincue et engagée, Alphonsine entraîne le lecteur dans les grands combats qui ont permis de faire évoluer la condition féminine. Derrière la force et la combativité d’Alphonsine, se cachent aussi des blessures, des failles, des secrets, des mensonges et des fuites en avant. L’auteure, à travers ses personnages, nous parle aussi de la société d’aujourd’hui, de ses travers mais sans en donner une vision manichéenne, sans jugement aucun, comme aime à le dire Hortense « tout n’est pas noir ou blanc, il existe des nuances de gris ». Ses personnages, tout comme de nombreux lecteurs, sont déboussolés et un peu perdus face à une société de plus en plus agressive, stressée, violente et vivant dans le virtuel numérique. Et de nous interroger sur l’importance de la famille, celle du sang et celle qu’on se choisit, sur le poids des secrets qui finissent par nous étouffer, sur notre résilience et notre capacité à pardonner pour qu’enfin, la vérité, salvatrice, éclate et nous laisse apaisés, sans haine et sans colère.
Si vous aimez les fictions historiques, les sagas familiales avec leur lot de secrets, les personnages hauts en couleur au caractère bien trempé, l’histoire d’Alphonsine va vous passionner. Une belle idée de lecture pour vos vacances….
Extraits:
« Ces gens-là ne peuvent se payer le luxe d’aimer. Ils essayent de survivre, c’est déjà pas mal!”
“Je dois assumer jusqu’au bout mes impostures pour notre bien à toutes les deux. Fuir est une méthode bien pratique pour protéger ceux qu’on aime.”
“Jadis, j’ai vécu de graves injustices. Pendant la guerre, des personnes que j’aimais profondément ne sont jamais revenues. Le plus désolant est que l’antisémitisme couve encore et encore, cela me donne la nausée. Dans un autre registre, j’ai aussi été lâche. J’ai fui… pour ne pas affronter la dureté de la vie. Aujourd’hui, j’en paye le prix fort. Mourir en ayant des regrets, c’est pire que tout et c’est justement ce que je ne voulais pas ! Comment ai-je pu commettre une telle erreur ?”
“Ce n’est pas la question d’avoir raison ou tort. C’est une façon d’aborder la vie. Quand on est face à des événements destructeurs, plusieurs chemins s’offrent à nous. Il suffit d’emprunter celui qui va nous orienter vers les solutions positives, celles qui guérissent le mental et l’âme.”
